D'anamorphoses en anamorphoses, je me suis désirée Autre. J'ai travesti le visible devant l'Intermédiaire, maquillé l'inanité, les ténèbres et le mal. Usurpatrice. Devant l'Eternel, je me suis peins un visage autre. J'ai dépravé mon corps au hasard des lubies méphistophéliques du destin, souillé mes étoiles fantasmées, blasphémé puis détruit avec extase l'amour propre illusionné. J'ai souhaité un instant vivre pleinement l'absurdité d'une Vie, ou plutôt du furtif sursis imposé sadiquement à l'âme déchue arrachée à la douceur voluptueuse de l'éther. En abandonnant mon sort entre les mains des contingences, j'ai libéré le corps du fardeau de l'esprit perturbé. L'inertie est un pêché, la peine est indécente. Le poison du doute, de l'attente et de l'espérance torturent l'être inachevé qui cherche à combler ses continents de vacuité afin d'incarner le Tout. Je nous ai trop aimé et trop haïs. Suffoquant sous les mensonges dont l'Autour m'assaille, le souffle s'intensifie, la respiration devient difficile et douloureuse. Le psychisme se tord sous le joug du tyran. Je m'éteins lentement, chaque jour un peu plus. Je me veux Anonyme. Les liens sont prison. Je cours vers la hideur, l'avilissement, la déliquescence, l'abandon. Je cours vers le réel, vers la vérité. Je déplore la beauté superficielle du monde que ma condition m'offre, prébendes, folklore, cadeau empoisonné détournant l'esprit du Vrai. Je t'en prie, détruis-moi ! Jeter mon enveloppe en pâture à la revanche de l'homme sur la Jocaste toute puissante, Intouchable, j'ai aimé en souffrir. Je ne cherchais pas le plaisir, mais à fuir un tourment. C'est comblée par l'Amant, l'esprit embrumé par le vertige face au mirage du néant, plus sensible que jamais, que je m'évanouis. Je m'illusionnais d'une délivrance, mais jamais l'inanité et le sentiment de déréliction ne se sont fait autant violence en mon sein. Le chaos me possédait dans ma globalité car même la douleur avait fuis ! Les morsures silencieuses de l'Amant avaient sournoisement enfanté la mortification. J'ai claqué la porte de la chambre 379 et j'ai couru, impudique, jusqu'au cimetière, sous l'oeil cynique et amusé de l'astre lunaire vespéral. Les pelles s'agitaient nerveusement dans mon cerveau malade et fatigué. J'ai gratté la terre, l'ai déposée sur mon corps tremblant. J'ai voulu me fondre en elle, m'enfoncer sous le marbre, évanescente. Anonyme.