Mardi 28 août 2007 à 17:31

D'anamorphoses en anamorphoses, je me suis désirée Autre. J'ai travesti le visible devant l'Intermédiaire, maquillé l'inanité, les ténèbres et le mal. Usurpatrice. Devant l'Eternel, je me suis peins un visage autre. J'ai dépravé mon corps au hasard des lubies méphistophéliques du destin, souillé mes étoiles fantasmées, blasphémé puis détruit avec extase l'amour propre illusionné. J'ai souhaité un instant vivre pleinement l'absurdité d'une Vie, ou plutôt du furtif sursis imposé sadiquement à l'âme déchue arrachée à la douceur voluptueuse de l'éther. En abandonnant mon sort entre les mains des contingences, j'ai libéré le corps du fardeau de l'esprit perturbé. L'inertie est un pêché, la peine est indécente. Le poison du doute, de l'attente et de l'espérance torturent l'être inachevé qui cherche à combler ses continents de vacuité afin d'incarner le Tout. Je nous ai trop aimé et trop haïs. Suffoquant sous les mensonges dont l'Autour m'assaille, le souffle s'intensifie, la respiration devient difficile et douloureuse. Le psychisme se tord sous le joug du tyran. Je m'éteins lentement, chaque jour un peu plus. Je me veux Anonyme. Les liens sont prison. Je cours vers la hideur, l'avilissement, la déliquescence, l'abandon. Je cours vers le réel, vers la vérité. Je déplore la beauté superficielle du monde que ma condition m'offre, prébendes, folklore, cadeau empoisonné détournant l'esprit du Vrai. Je t'en prie, détruis-moi ! Jeter mon enveloppe en pâture à la revanche de l'homme sur la Jocaste toute puissante, Intouchable, j'ai aimé en souffrir. Je ne cherchais pas le plaisir, mais à fuir un tourment. C'est comblée par l'Amant, l'esprit embrumé par le vertige face au mirage du néant, plus sensible que jamais, que je m'évanouis. Je m'illusionnais d'une délivrance, mais jamais l'inanité et le sentiment de déréliction ne se sont fait autant violence en mon sein. Le chaos me possédait dans ma globalité car même la douleur avait fuis ! Les morsures silencieuses de l'Amant avaient sournoisement enfanté la mortification. J'ai claqué la porte de la chambre 379 et j'ai couru, impudique, jusqu'au cimetière, sous l'oeil cynique et amusé de l'astre lunaire vespéral. Les pelles s'agitaient nerveusement dans mon cerveau malade et fatigué. J'ai gratté la terre, l'ai déposée sur mon corps tremblant. J'ai voulu me fondre en elle, m'enfoncer sous le marbre, évanescente. Anonyme.

 

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Vendredi 10 août 2007 à 14:05

Pendant la première partie de sa vie, on ne se rend compte de son bonheur qu'après l'avoir perdu. Puis arrive une seconde phase où l'on sait déjà au moment où l'on commence à vivre un bonheur, que l'on va au bout du compte, le perdre. Lorsque je le rencontrai, je compris que je venais d'entrer dans cet âge second. Je compris également que je n'avais pas encore atteint la troisième phase, celle où l'anticipation de la perte empêche de vivre. Cependant, parfois dans mon esprit règne un tel anachronisme que je peux éprouver nimporte laquelle de ces situations. L'âge est prison. Les affres du temps m'avaient déjà condamné de nombreuses portes, mais j'étais encore assez jeune pour me permettre de dilapider mon énergie en vaines futilités..Si nous voulons accéder à l'Ataraxie, nous n'avons pas d'autre solution que de naître une seconde fois, afin de se libérer de la mélancolie des limbes, il nous faut revivre le douloureux traumatisme originel et en triompher ! J'adule ces doux instants où j'oublie le Moi dans une attente trop frénétique pour concerver la moindre lucidité, incapable d'interpréter correctement un signal quelconque de manière logique. J'ai pris conscience que tout mon être n'a été par le passé que la tragique victime d'une Espérance grotesque. J'avais à présent le choix entre accepter la mortalité, la déliquescence progressive et inexorable ou bien demeurer l'Immortelle du Désert Blanc. [L'intensité prime sur la longévité] Et je réalisai que toute émotion - aussi illusoires soient les émotions- , toute sensation parcourant nos déchets charnels est préférable à cette chose sombre et sournoise, cette inanité universelle qui stagne en nous... 
Nous devons croire à l'Illusion car elle est l'incarnation de la Vie. L'Autour vous ennivre et son poison exquis vous mortifie lentement et insidieusement.

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